dimanche 24 juillet 2011

POLITIQUE DE GRATUITE DES SOINS EN COTE D’IVOIRE: EN FIN DE COMPTE QU’EST CE QUI EST GRATUIT ?




Les ivoiriens ont connu quatre difficiles mois suite aux troubles militaro-politiques, liés à la crise post électorale. Avec l’insécurité grandissante, la fermeture des banques et des autres institutions financières, l’on a assisté à une véritable paupérisation de la population. A la fin des belligérances, les ivoiriens ont été agréablement surpris de la décision prise par le nouveau gouvernement de pratiquer une politique de gratuité des soins dans les établissements sanitaires publiques, parapubliques et à base communautaire. De l’avis de la grande majorité des gens, cette décision a été perçue comme une bouée de sauvetage en cette période de conjoncture économique. En conséquence les populations, même quand le besoin n’était pas réel, prirent d’assaut les allées des hôpitaux et autres centres de santé. Après une première phase de quarante cinq jours, allant du 16 avril au 31 mai 2011, cette politique de gratuité s’est vue prolonger pour une durée non encore déterminée. Malgré le sentiment de satisfaction constamment exprimé dans la presse par les premiers responsables du ministère en charge de la santé, la réalité sur le terrain est toute autre et des difficultés sont constatées dans la mise en œuvre de la mesure. L’augmentation fulgurante du taux de fréquentation des établissements sanitaires - parfois supérieure à 100% du taux habituel - a eu pour conséquence de perturber le système de l’offre des services.
La surcharge de travail a entraîné un « burn-out » et donc une démotivation des prestataires de soins. Cela a eu comme répercussion, une baisse relative de la qualité des prestations (réduction du temps de contact soignant – client lors des consultations < 10 minutes). Le constat général est que le paquet de services minimum sensé être gratuit - surtout dans les unités para cliniques - n’existe plus ou est insuffisamment délivré. Du fait de la sur-utilisation des services, Il y’a un épuisement rapide des stocks de médicaments essentiels, des intrants stratégiques et des consommables ; lesquels stocks qui ne sont pas immédiatement renouvelés. De nombreux laboratoires et services de radiographie ont cessé de fonctionner ces mois-ci, pour faute de disponibilité d’intrants. Les patients sont souvent obligés d’avoir recours, pour ceux qui en ont les moyens, aux établissements privés à but purement lucratif, pour effectuer des examens d’explorations para-cliniques. Ainsi, les sacro-saints principes de globalité et de continuité qui sous-tendent la délivrance des soins, ont du coup été foulés aux pieds.
Par ailleurs, il faut noter que le retard à l’arrivée des subventions promises et même débloquées par l’état comme mesure compensatoire, rend difficile la tache des gestionnaires des établissements sanitaires à assurer, ne serait-ce que l’entretien des locaux. Face à tout cela, on est en droit de se poser la question de savoir ; « en fin de compte qu’est ce qui est gratuit dans cette politique de gratuité de soins ? ».
Les solutions que nous proposons sont :

1- Si cette mesure de gratuité est le début de l’instauration de la Couverture Maladie Universelle (CMU) tant promise lors de la campagne électorale de l’actuel président ; que les ressources soient effectivement mobilisées pour en assurer la mise en œuvre. Un accent particulier doit être mis sur la mise en place de mesures d’accompagnement véritablement pérennes.
2- Dans le cas contraire, que l’on revienne au système de payement direct qui était en vigueur auparavant.
3- Ou que la politique de gratuité soit strictement « catégorielle » comme proposé dans le rapport du The Global Campaign for the Health Millennium Development Goals – 2009. C'est-à-dire que la mesure soit valable seulement pour les couches sociales les plus vulnérables, à savoir les femmes enceintes et les enfants de moins de cinq ans. Elle pourrait être élargie aux personnes de troisième âge.

lundi 4 juillet 2011

A PROPOS DE L'ORGANISATION DE L'OFFRE DE SOINS A ABOBO PENDANT LA GUERRE


Pendant les troubles qui ont précédés le deuxième tour des élections présidentielles en Côte d’Ivoire, nombreux sont les établissements sanitaires qui ont vus leur fonctionnement perturbé. La presque totalité (98%) des hôpitaux et autres centres de santé de la commune d’Abobo (un faubourg au nord d’Abidjan) ont été fermé, du fait de l’absence du personnel soignant. Ceux-ci ont dit craindre pour leur vie car il n’y avait plus de sécurité, ce qui est fort légitime. L’ONG internationale « Médecin Sans Frontière», pour répondre aux besoins criards de soins de santé, s’est installée à l’hôpital général d’Abobo Sud. Comme à son habitude en situation de crise, MSF n’offre que des services d’urgences médicochirurgicales. MSF a mis en place une organisation temporaire qui garantie la disponibilité des médicaments de première nécessité, l’accessibilité aux examens biologiques standard et le renforcement du plateau technique. Il a également renforcé son staff technique en recrutant du personnel sur place, au travers de contrat de courte durée. Par ce contrat, le personnel s’engage à assurer un paquet d’activités de soins médicaux, chirurgicaux et obstétricaux d’urgence moyennant une prime mensuelle plus ou moins consistante, qui lui est versée par MSF. Cela est de bonne guerre et cadre avec le contexte, mais ce même personnel a déserté son poste sous le prétexte « légitime » que sa sécurité n’était point assurée. J’en veux pour preuve qu’un chirurgien d’un autre hôpital de la même commune (HG Abobo Nord), absent de son poste tout le mois de mai, était présent à l’hôpital général d’Abobo Sud au côté de MSF. Le constat général a été que, le personnel qui, en temps normal n’était pas toujours disponible, a fait montre d'une ponctualité et d'une assuidité exceptionnelle à son « poste MSF ». Certains ont même élu domicile dans l’enceinte de l’établissement, dormant parfois dans leur bureau, juste pour ne pas manqué à l’appel. ils furent certainement guidé par la « conscience professionnelle ».
En tenant compte de ce qui précède, on est amené à faire les recommandations suivantes :
1) - Que l’état, par l’intermédiaire du ministère en charge de la santé, adopte la même attitude que les ONG et institutions internationales comme MSF, CICR, ACF, SAVE THE CHILDREN et autres Médecin Du Monde. C'est-à-dire que l’état, avec le soutien renforcé des organes du Système de Nations Unis, et conformément aux conventions de Genève (1949) et ses protocoles additionnels, garantisse la protection des blessés et malades ainsi que des personnels de santé en période de guerre.
2) – Que l’état prévoit aussi le versement des primes exceptionnelles, dites « primes de crise » aux personnels qui acceptent de consentir le sacrifice afin d’assurer le maintien d’un service minimum dans les établissements de santé en période de trouble majeur.