jeudi 5 janvier 2012

MA CONTRIBUTION AU RENFORCEMENT DE LA POLITIQUE DE SOINS ÉQUITABLE POUR TOUS EN COTE D’IVOIRE


 Maternité de l'HG  Zouan Houanien - Ouest Côte d'Ivoire
Bonne et heureuse année 2012 à tous


Introduction
A la faveur de la conférence de Bamako en 1987 où une fois encore l’accent a été mis sur les soins de santé primaires (SSP), on a assisté à la mise sur pied d’une nouvelle politique sanitaire basée sur le principe de « la distribution équitable des ressources pour assurer l’accès de la grande majorité des gens à celles-ci » (Velasquez, 1989). Les autorités ivoiriennes,  à travers le Ministère de la Santé Publique, se sont assignées la mission de mettre en place une politique de soins équitables et de qualités à l’ensemble de la population, en mettant un accent particulier sur les groupes vulnérables que sont la mère, l’enfant et les personnes marginalisées, dans le cadre de la Stratégie Nationale de la Réduction de la Pauvreté (N’Dri Y. 2008). Pour répondre à cette exigence, le ministère s’est doté en 1996, d’un Plan National de Développement Sanitaire (PNDS). L’objectif principal était d’améliorer l’état de santé de la population par une meilleure adéquation qualitative et quantitative entre l’offre des prestations sanitaires et les besoins essentiels en santé (PNDS 96-2005).
La fin de l’année 1999 a été marquée en côte d’ivoire par le déclenchement d’une rébellion armée, qui a désorganisé le dispositif sanitaire en place. Elle a causé de nombreux obstacles à la mise en œuvre du PNDS, mettant en mal le principe fondamental des SSP et de l’IB, à savoir « garantir l’équité de l’accès aux soins » pour tous (OMS, 1999b).
Aujourd’hui, l’on est en droit de se demander quelles sont les stratégies à élaborer pour renforcer la politique de l’équité dans l’accès à l’offre de soins pour un système de santé efficace. Dans la première partie de cet essai, nous faisons une analyse de la situation du système sanitaire, pour en dégager la problématique. Dans une seconde partie, nous proposons quelques axes stratégiques pour améliorer l’offre de soins.

1.   Analyse de la situation 

1.   2- Au plan de l’organisation 
Le système de santé ivoirien comprend l’offre publique de soins, l’offre de soins privée et l’administration sanitaire (cf arrêté n°28 du 8 février 2002). L’offre publique est organisée selon une pyramide sanitaire à trois niveaux : primaire, secondaire et tertiaire. Le recours aux différents échelons de cette pyramide selon l’ordre préétabli, n’est pas toujours respecté (PNDS 2009-2013). Du point de vu des grandes orientations dans le domaine de la santé, une politique de gratuité (circonstancielle) des soins a été décidée depuis avril 2011. Cette bonne initiative a connu quelques difficultés dans son exécution sur le terrain, eu égard à l’interruption répétée de la subvention apporté par l’état.

1.   3 - Au plan du financement 
Le PIB de la côte d’ivoire est de 19570 millions de dollars et le PIB per capita estimé à 1065 dollars (www.Statistiques-mondiales.com Côte d’Ivoire). Le budget annuel de l’état avoisine 2000 milliards de FCFA, la part octroyée au ministère de la santé a baissé de 20%, passant de 98,6 milliards (7,76%) en 2000 à 79 milliards de FCFA (4,11%) en 2006. La contribution des partenaires au développement au budget du MSP a été de 8,7% dans le même période (PNDS 2009-2013). La part des ménages au budget de la santé dépasse 30% (Ministère de la santé 2008).

1.   4 - Au  plan épidémiologique 
Les indicateurs restent toujours insuffisants. Le taux d’utilisation des structures sanitaires est bas, entre 0,15 et 0,30 contacts par an et par habitant. La mortalité maternelle (543 p100000) et infantile (114 p1000) demeurent élevées. Le taux d’accouchement assisté est 60% et la prévalence contraceptive estimée à 15% (INS 2005). Des maladies endémiques telles que la rougeole, la fièvre jaune et la poliomyélite sont encore présentes et les couvertures vaccinales sont encore basses ( inférieures à 90%, PEV 2007). Selon l’institut national de statistique (2006), un enfant de moins de cinq ans sur trois souffre d’une malnutrition chronique ou d’un retard de croissance. Ainsi, la prévalence de la malnutrition chronique est passée  de 20,8% en 2004 à 33,9% en 2006 avec 15,7% de forme sévère.

1.   5 - Au plan des infrastructures 
La couverture en infrastructure sanitaire est faible (01 Établissement pour 12822 habitants), une maternité pour 14000 FAP et un lit pour 2890 habitants). La plupart des infrastructures  sanitaires sont insuffisamment fonctionnelles, du fait de leur état de dégradation et d’obsolescence assez poussées. La faiblesse des ressources allouées à l’investissement (25%) et l’absence d’une véritable politique de maintenance, en sont les causes profondes  (PNDS 2009-2013). A cela il convient d’ajouter une inégale répartition des établissements sanitaires sur le territoire national, cause de disparités régionales donc d’existence de zones de silence en termes de couverture sanitaire. Il en résulte la problématique de l’inégalité concernant l’accessibilité géographique aux soins.

1.   6 - Au plan des ressources humaines
L’effectif est insuffisant (2007, 1 médecin p.5695 habitants, 1 infirmier p.2331 habitants et 1 sage femme p.3717 FAP) du fait de la réduction de la masse salariale liés aux difficultés économiques limitant le recrutement. On ajoute à cela une fuite des cerveaux due à la démotivation des personnels et à la quasi-inexistence des services publics (PNDS 2009-2013).

1.   7 - Au plan des principaux déterminants de la santé 
Le facteur socio-économique est marqué par  la paupérisation aggravée par la situation de guerre. Selon le PNUD, le taux de pauvreté en 2006 était de 44% en côte d’ivoire. Le faible pouvoir d’achat des populations, limite leur accès aux services sociaux de base. Cela est beaucoup plus préoccupant lorsqu’il s’agit d’accès aux soins de meilleure qualité en milieu hospitalier (public et privé) où le coût des prestations reste encore élevé. Cela traduit la difficulté de l’accessibilité financière à l’offre de soins dans la population.
Le facteur socioculturel caractérisé par le faible niveau général d’instruction et d’éducation (taux net de fréquentation du cycle primaire 55%, taux d’achèvement du primaire 17%) et la tendance naturelle d’une grande partie de la population (79%, Harris Memel-Fotê, 2008),  à avoir un recours systématique à la médecine traditionnelle.  

De cette  analyse, il ressort que face à une demande de santé élevée et diverse, l’offre reste encore insuffisante pour couvrir équitablement les besoins des populations.

2.   Contribution pour renforcer la politique de soins de santé équitable

Susciter la volonté politique en faveur des déterminants sociaux de la santé
Mener des plaidoyers pour obtenir une répartition judicieuse des soins, de sorte à ce qu’ils soient prodigués à ceux qui en ont le plus besoin. Ces actions doivent être intersectorielles et faire intervenir de façon concertée l’ensemble des pouvoirs publics, la société civile, les leaders d’opinion,  les communautés locales, le monde des entreprises et les instances mondiales et internationales. (OMS 2008)
Les décideurs doivent respecter l’engagement fait au sommet d’Abuja (avril 2001), d’augmenter la part de l’état au budget de la santé à 15%.

Mettre l’accent sur la bonne gouvernance dans le management des systèmes de santé
Veiller à ce que les managers des systèmes de santé soient des personnes compétentes, disponibles, intègres et responsables. Renforcer la lutte contre la corruption. Les détournements des subventions et aides destinées au financement du système de santé, doivent être sévèrement punis par la loi. Renforcer le système d’audit et de contrôle des finances publiques. Impliquer toutes les parties prenantes, donc restructurer et rendre fonctionnel les COGES.

Offrir des services essentiels en mettant l’accent sur la qualité des soins
S’assurer de fournir effectivement au niveau centre de premier contact, les prestations telles que définis par les Directives Nationale sur le Paquet Minimum d’Activités des soins de santé en côte d’ivoire.
Définir clairement et mettre en œuvre une politique de gestion des ressources humaines : améliorer les ratios professionnel de santé/nombre d’habitant de façon équitable sur étendus du pays, améliorer la disponibilité du personnel soignant en les motivant par une rémunération adéquate.
Instituer une véritable politique d’amélioration du cadre de travail par la réhabilitation des infrastructures, le renouvellement et la maintenance régulier du plateau technique.
Améliorer la qualité des services : réduire le temps d’attente aux urgences et à l’accouchement et rendre accessibles les coûts des prestations aux utilisateurs.

Prioriser les interventions qui favorisent l’atteinte rapide des OMD
Mettre l’accent sur les activités préventives et promotionnelles : PEV, lutte contre les grandes endémies, santé maternelle et infantile. Pour cela, il faut veiller à l’application du septième principe directeur de l’Initiative de Bamako (Mc Pake et al. 1992) à savoir que “des mesures telles que des exonérations et des subventions doivent être prises pour garantir l’accès aux couches sociales les plus démunies aux soins de santé”. Gratuité pour certains actes : accouchement normal ou par césarienne, urgences chirurgicales. la subvention octroyée au traitement des certaines maladies (sida, tuberculose et paludisme) doit être étendue aux autres pathologies chroniques. gratuités des soins pour les personnes déclarées indigents par les COGES. Rendre fonctionnelle et généraliser l’Assurance Maladie Universelle.

Conclusion
La Côte d’Ivoire vient récemment d’être classée parmi les pays les plus pauvres du monde (initiative PPTE). L’analyse faite de son système de santé, à partir de la revue des données de base, a révélé une énorme insuffisance de celui-ci au plan qualitatif que quantitatif. Une volonté des politiques à améliorer les principaux déterminants de la santé, la bonne gouvernance, la fourniture de services essentiels de qualité et la priorité à l’atteinte rapide des OMD, constituent les gages d’un accès équitable aux soins de santé. 


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Harris Memel-Fotê, La Santé, la maladie et les médecines en Afrique, Les Éditions du CERAP, Abidjan, 2008, 184 p.

Institut National de la Statistique, 2005. Enquête sur les indicateurs du SIDA en Côte d’Ivoire 2005.

Institut National de la Statistique, 2006. Suivi de la situation des enfants et des femmes: Enquête nationale à indicateurs multiples 2006 - Rapport final

Mc Pake, Hanson, K., & Mills, A. 1992. “Implementing the Bamako initiative in africa, a review and five case studies: London school of hygiene and Tropical Medecine PHP Department    Publication. OMS 1999b”.

Ministère de la Santé et de L’hygiène Publique, 1996.Plan National de Développement Sanitaire 1996-2005.

Ministère de la Sante et de l’Hygiène publique, 2008. Plan National de Développement Sanitaire 2009-2013.

N’Dri Yoman, T. 2008 : « Comment se soigne-t-on aujourd’hui en Côte d’Ivoire ». Vendredi du CERAP.

OMS 2008 : Instaurer l’équité en santé en agissant sur les déterminants sociaux de la santé » Commission des Déterminants sociaux de la Santé Résumé Analytique Du Rapport Final –

Programme Elargi de Vaccination (PEV), 2007. Rapports d’activité 2007.

Velasquez, G. (1989). Médicaments et financement des systèmes de santé dans les pays du tiers monde « le recouvrement des coûts » : un concept à revoir. Revue Tiers Monde, XXX (118), p 416.

www.reseauafrique2000.org/docs/Documents/abuja_declaration_2001_f.doc sommet d'abuja avril 2001: Déclaration d’Abuja sur le VIH/SIDA, la tuberculose et autres maladies infectieuses connexes.

www.Statistiques-mondiales.com Côte d’Ivoire.