mercredi 23 janvier 2013

LA SANTE DANS LE PLAN NATIONAL DE DEVELOPPEMENT 2012-2015 DE LA COTE D’IVOIRE : AU DELA DE SIMPLES PARADIGMES


A l’orée  de son indépendance en 1960, La côte d’ivoire a choisi le libéralisme économique basé sur l’initiative privée et l’ouverture sur l’extérieur pour amorcer son développement. Malgré cette option, elle a procédé pendant les cinq dernières décennies à élaborer plusieurs planifications aussi bien décennales que quinquennales. Ces plans se traduisaient par des visions telles que « Côte d’Ivoire 2000 », « Côte d’Ivoire 2010 », et aujourd’hui « Côte d’Ivoire 2025 ». Tout ceci avait pour objectif d’atteindre une croissance économique forte avec la participation des nationaux aux activités des secteurs clés et de faire la promotion individuelle mais aussi collective de l’homme ivoirien.
Entre 1960 et 1980, la Côte d’Ivoire a connu un boom économique. Avec l’effet conjugué du choc pétrolier, de la chute des cours mondiaux des matières premières de base et de la hausse des taux d’intérêt, l’économie du pays a eu une récession drastique à partir des années 80. En conséquence, des programmes d’ajustement structurel ont été adoptés pour relancer la croissance économique. Malheureusement, les programmes d’ajustement structurel n’ont pas permis de relancer l’économie. En plus, les crises sociopolitiques successives ont eu pour effet de freiner davantage le développement du pays.
Ainsi le taux de pauvreté est passé de 10% en 1985 à 36,8% en 1995 et à 48,9% en 2008. Dans le souci donc de ramener la Côte d’Ivoire à une croissance vigoureuse et d’en faire « un pays émergent à l’horizon 2020 », un Plan National de Développement  (PND 2012 – 2015) a été élaboré. Du point de vue méthodologique, l’élaboration de ce plan  s’est appuyée sur la capitalisation de certains documents officiels existants, était participative et basée sur  l’approche de gestion axée sur les résultats.
Concernant le secteur de la santé, le diagnostic montre que la situation reste encore préoccupante malgré les efforts conjugués de l’état et des partenaires au développement. Les déterminants de cette situation sont entre autres (i) un taux de croissance élevé de la population, (ii) un fort taux d’analphabétisme, (iii) une mortalité et une morbidité élevées liées au paludisme et à la pandémie du VIH/sida. Par rapport au système de santé, il est faible et marqué par : (i) une répartition inégale du personnel sur l’ensemble du territoire, (ii) une faible accessibilité des populations aux services de santé et aux médicaments de qualité, (iii) une insuffisance des ressources financières, (iv) une faiblesse du système d’information et de gestion et (v) une insuffisance de l’hygiène publique et hospitalière.
Les objectifs de la vision exprimée dans ce plan visent à améliorer certains indicateurs clés de santé. Il s’agira par exemple de réduire la mortalité infantile et maternelle (OMD 4 et OMD 5) afin de ramener en 2015, le taux de mortalité des enfants de moins 5 ans à moins de 50 pour 1000 naissances vivantes et la mortalité maternelle à moins de 150 décès pour 100 000 naissances vivantes. Pour cela, il a été proposé le renforcement des activités relatives à la prise en charge de la mère, de l’enfant et du nouveau-né, aux campagnes intégrées et à la surveillance épidémiologique. Les efforts visent également à améliorer la qualité de la prise en charge et de la prévention pour ramener le taux de prévalence du VIH/sida à 2,5%, l’incidence du paludisme à 50 cas pour 1000 habitants et celle de la tuberculose à moins de 75 cas pour 100 000 habitants pour l’horizon 2015 (OMD 6).

Toutefois, la probabilité pour que  ces objectifs se réalisent, reste très hypothétique. De nombreux obstacles demeurent encore sur le chemin et la progression risque d’être trop lente pour inverser de façon significative la tendance. En effet, au-delà de simples paradigmes, il faut opérer de véritables changements et réformes dans notre système de santé. Il faut aller plus loin. Le renforcement du système de santé est la base essentielle de toute amélioration durable des indicateurs de santé. Il ne s’agit pas seulement de se concentrer sur l’offre de soins, mais surtout d’améliorer toutes les six composantes essentielles –leadership et gouvernance ; financement ; ressources humaines ; offre de soins ; système d’information sanitaire ; infrastructures, médicaments et technologie sanitaire- du système de santé ainsi que les interactions entre elles. A ces composantes, il faudrait ajouter des valeurs d’équité, de redevabilité et de participation des bénéficiaires à la prise de décision.
A défaut d’engager réellement le développement du système de santé, il serait illusoire de penser que ces objectifs nobles et légitimes pourraient être atteints. Le risque serait d’assister à une fragmentation des financements, un gaspillage des ressources déjà insuffisantes et une détérioration de la situation sanitaire déjà fragile.
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Bangaly Doumbouya