samedi 12 novembre 2011

INTERET DE LA PRISE EN CHARGE PSYCHOLOGIQUE DANS LA PATHOLOGIE DU VIH/SIDA




Auteur:
Enfant en consultation de psychologie
Madame MOH SEMDE Corinne
Psychologue Clinicienne

ONG Aconda vs côte d'ivoire



Le VIH/sida est une pathologie qui affecte le corps dans toutes ses composantes : somatique, psychologique et sociale. Au niveau du vécu psychologique, un certain nombre d’effets consécutifs au VIH vont prendre naissance. Des remaniements psychologiques importants vont se faire chez la PVVIH ce qui va générer pour certains, des comportements traduisant un mal être. En fonction du type de population, des fonctionnements psychologiques  des individus, les interventions  des psychologues varient. Le VIH/sida aussi bien chez l’adulte homme ou femme, l’adolescent et l’enfant  vient bousculer les habitudes.

1.      Les adultes vivant avec le VIH 

1.1     Traumatisme de l’annonce et gestion du secret
La révélation du diagnostic VIH est à l'origine d'un traumatisme pour soi même et pour l’entourage. La connaissance du statut de la mère ou du père initie parfois le test de sérologie VIH  des enfants accroissant ainsi l'angoisse. Même attendue, l'annonce est toujours un choc qui rend réel ce en quoi on ne voulait pas croire.
Elle cause un profond remaniement psychologique chez la personne par rapport à ses croyances, son vécu quotidien, ses projets de vie.
L’annonce doit toujours être participative : informer et écouter permet  l’expression des  préoccupations.

1.2     Angoisse/Dépression
L’angoisse du malade chronique qui voit se succéder  les affections  qui rendent la PVVIH dépendante de son entourage ouvrant ainsi la voie à l’infantilisation, la dévalorisation, la perte de l’estime de soi.
 Cette angoisse revêt différentes formes : l’angoisse de mort aussi bien chez la personne concernée que chez l’entourage, l’angoisse de séparation qui entraine vis-à-vis des proches des comportements d’évitements et de repli sur soi. La PVVIH ne se projette plus dans le futur  et connaît une mort psychologique et sociale.

1.3     Observance
L’observance au traitement s’inscrit dans le temps. Celle ci est soumise à  l’adhésion des patients conditionnée à son tour par : la croyance en son efficacité, la capacité à faire face aux effets secondaires source d'inquiétude quand on sait que pris à long terme certains médicaments peuvent entrainer  des  maladies métaboliques, des neuropathies, la pancréatite, les lipodystrophies, les hyperpigmentations de la peau et des phanères et des téguments…
Les aménagements indispensables  des habitudes et du cadre de vie (familial, professionnel et social) contribuent à une bonne observance.

2.      Enfants et adolescents vivant avec le VIH
Chez les enfants et les adolescents vivant avec le VIH, au-delà des premières années, l'infection prend un caractère chronique qui joue forcement un rôle perturbateur dans leur développement psycho affectif et intellectuel (Blanche, 1998).
L’enfant malade nous  renvoie à voir une mère  culpabilisante qui n’a pas pu protéger son enfant du virus. Ce contexte dépressif est celui dans lequel l'enfant va se développer. Les difficultés psychologiques de l'enfant sont  donc perceptibles.
Au niveau de la famille, La mère peut se retrouver seule parce qu'elle n'a pas informé le père. La famille peut également se replier sur elle par peur d’exposer la maladie de l’enfant à l’entourage et par ricochet, s’exposer elle-même. Dans ce contexte le père reste un soutien essentiel  à la mère pour l’équilibre de la famille. Les adolescents infectés par le  VIH se retrouvent quant à eux, dans des difficultés particulières que le VIH vient exacerber (Aka Dago-Akribi, Cacou, 2004). La pathologie du sida touche le système biologique et affectif de l'adolescent déjà en crise et cela le perturbe profondément. Chez les adolescents, le développement du corps n'est pas toujours en adéquation avec l'âge. On note un retard staturo-pondéral (taille, poids, caractères sexuels secondaires, survenue des règles, etc.) source de complexes et de mal être particulièrement réducteur (Blanche, 1998).
L’image du corps est atteinte. L’adolescent vit entre culpabilité et angoisse. Dans son comportement transparait  l’agressivité, la révolte à l’autorité, les comportements marginaux (le vol, l’alcool, la cigarette…), le refus de prendre les médicaments.
Lorsqu’il n’est pas informé, la tâche est très complexe. L’adolescent  vit une ambivalence entre la connaissance du statut et le secret. La méfiance s’installe vis-à-vis des parents et de l’équipe soignante. Tout ceci faisant le lit à l’angoisse et à la dépression agissant sur la prise en charge et les projets de vie.

Conclusion
Que l’on soit adulte, adolescent ou enfant, nous avons des problématiques communes au VIH : annonce, angoisse, dépression, observance et la déstructuration familiale interagissent sur le vécu quotidien de la PVVIH. Il est donc nécessaire dans ce suivi de longue durée de prendre en compte outre les aspects médicaux, la pluridisciplinarité des interventions dont l’intervention psychologique. Les spécificités du point de vue psychologique et la prise en compte des aspects psychologiques permettent un soutien effectif et ciblé pour améliorer son vécu garantissant une bonne qualité de vie.

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  1. Aka Dago-Akribi L-H., Cacou Adjoua M-C., « Psychosexual development among HIV- positive adolescents in Abidjan , Ivory Coast ». Reproductive Health Matters 12 (23): 1-10, 2004.
  2. Blnche S. L'infection à VIHH de la mère à l'enfant Paris, Flammarion Médecine-Sciences, 1998.
  3. Hortense, A. D. A. (2007). Enfant et VIH : du somatique au psychologique. Expériences à Abidjan, Côte d’Ivoire. Face-A-Face, 10(Regards sur la santé).

samedi 1 octobre 2011

AFFAIRE ROBERT BOURGI : LES MALETTES DE FRICS, ÇA POUVAIT FINANCER DES CAMPAGNES DE VACCINATION EN AFRIQUE


Profession: transporteur de mallettes de billets de banque
Deux mille douze prévoit être  une année électorale mouvementée en France. Chaque état major politique affûte son arme pour ne pas être le dernier sur la scène. Tous les coups semblent permis. Me Robert Bourgi, du haut de son vieux col calciné, a jeté le pavé dans la marre. En effet, l’éminent avocat français affirme dans des déclarations à la presse, avoir été témoin actif  entre 1995 et 2005, de transport de valises pleines de billets de banque, qui lui auraient été remises par des présidents africains en destinations d’hommes politiques français pour financer leurs activités. D’énormes tapages médiatiques sont en cours actuellement sur ce sujet. Dans la forme, le citoyen lambda au sud du Sahara n’en est pas ému outre mesure. Celui ci est à présent préoccupé par la recherche de solutions pour obtenir un mieux être quotidien. Comme on le dit chez nous à Abidjan, « lui il fait rien avec ça ». Et puis; on sait tous qu’il est socialement admis sous les tropiques qu’un président dispose d’un budget spécial qu’il peut  « souverainement »  utiliser pour témoigner sa générosité à qui il veut et sans rendre compte à quiconque, même si cet argent provient de la poche du contribuable. Mais dans le fond, un petit retour en arrière dans la littérature attire notre attention sur le fait que les indicateurs des principaux déterminants de la santé  en Afrique subsaharienne, n’étaient pas du tout reluisant dans la décennie 1995-2005 1. Il est à noter aussi que dans la même période, sur l’ensemble des 53 états membres de l’Union Africaine, seuls 6 ont vraiment honoré les engagements d’Abuja 2, à savoir allouer 15% ou plus du budget de l’état au secteur de santé. Il s’agit du Rwanda (18.5%), du Botswana (17.8%), du Niger (17.8%), du Malawi (17.1%), de la Zambie (16.4%) et du Burkina Faso (15.8%). En outre, 32 des 53 états membres de l’Union Africaine investissent toujours moins de 20 dollars US par tête d’habitant dans le secteur de la santé, soit moins de la moitié des 40 dollars US recommandés par l’OMS. Jusqu’en 2010, aucun pays de la France Afrique cités dans l’affaire Bourgi n’était en voie d'atteindre un Objectif-santé du Millénaire pour le Développement. A ce propos, pour l’objectif 4A (qui est de réduire de deux tiers, le taux de mortalité chez les enfants de moins de 5 ans, entre 1990 et 2015) malgré les progrès réalisés, on continue de constater que dans certains pays africains, le taux de mortalité des enfants de cette tranche d’âge est encore supérieur à 200 décès  pour 1000 naissances d’enfant vivants par rapport à d’autres pays en développement comme la Thaïlande, le Chili et Cuba où ce taux est inférieur ou égal à 10 décès pour 1000 naissances d’enfants vivants 3. Cette analyse faite, on se demande bien quel est le problème. N’y a t-il pas d’argent ? En réalité ce qu’il n’y a pas, c’est la volonté politique dans la prise de décisions pour la gestion des secteurs vitaux comme la santé et le social. Si les « allégations-sans-preuves » de Me Robert Bourgi sont avérées, il sera difficile de  comprendre qu’un flux financier aussi important (20 millions de dollars US) se fasse du Sud traditionnellement demandeur vers le Nord habituellement donateur, ce que nous n’avons pas l’habitude de voir. Or donc les pays de la France Afrique ont du fric. Nous en appelons à la prise de conscience des organisations de la société civile africaine sur les problèmes concernant les secteurs de la santé et du social. Nous recommandons également leur implication très très « activiste » - modèle ACT UP pour le VIH/sida-, afin d’influencer les instances de prise de décision. Car comme le dit l’autre dans la chanson : « no one but ourselves can save our life ».
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1. http://www.who.int/whosis/whostat/whostat2005en.pdf (visité le 26 septembre 2011)
2. Africa Public Health Alliance & 15%+ Campaign, http://www.who.int/pmnch/media/membernews/2010/20100721_africanunion_pr/en/index.html (visité le 26 septembre 2011)
3. Note d’information : 10 ans après « l’engagement d’Abuja » d’allouer 15% des budgets nationaux à la santé, http://www.uneca.org/cfm/2011/documents/French/InformationNote10Years-after-theAbujaCommitmentFR.pdf
(visité le 26 septembre 2011)

vendredi 9 septembre 2011

ASSURER LA CONTINUITE DES SOINS CHEZ LES POPULATIONS MOBILES VIVANT AVEC LE VIH/SIDA SUR L’AXE ROUTIER OUEST AFRICAIN ABIDJAN-LAGOS: UN VERITABLE DEFI

Dr Dionkounda R. Aristide
Coordonnateur Projet

OCAL/ALCO (Abidjan-Lagos Corridor Organization)

ACONDA-VS CI

23 BP 2485 Abidjan 23

Mobile :
+225 08 30 79 22 / 40 18 57 84

courriel :
ristodion1@yahoo.fr


L’axe routier Abidjan - Lagos est long de 1022 km et relie le Nigeria à la côte d’ivoire, en passant par le Ghana, le Togo et le Bénin. Cet axe de migration par excellence, constitue un corridor caractérisé par une intense activité économique basée sur le transport. Les cinq pays concentrent à eux seuls, 65% du poids économique des états de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO). La population résidente est estimée à 30 millions et celle en transit à 47 millions par an (OCAL 2009).

Cet axe est principalement emprunté par les transporteurs et les routiers, auxquels on ajoute les voyageurs ponctuels, les jeunes, les étudiants, les fonctionnaires, les hommes en uniforme, les commerçants et les professionnelles du sexes. Ces populations se caractérisent par leur mobilité et leur localisation sur l’axe.


ÉTAT DES LIEUX DE L’AXE DE MIGRATION ABIDJAN – LAGOS

Du fait des tracasseries administratives, les populations migrantes passent de longs séjours sur l’axe Abidjan – Lagos, occasionnant des comportements qui augment les risques de contamination aux IST/VIH/SIDA. Il s’agit des rapports sexuels occasionnels et multiples. Même si le taux de prévalence y généralement bas, le rapport OMS/ONUSIDA de 2009 continue d’affirmer que 22,4 millions des personnes vivant avec les VIH se trouvent en Afrique subsaharienne. Des études soutiennent également que les migrants adoptent des comportements qui induisent des risques de contamination plus élevés, car ils sont isolés de leur famille et de leur réseaux d’appui social et ils ont souvent un accès limité aux services de prévention (White 2003, Khan et Al. 2007). Face à cette situation, il est apparu nécessaire de mettre en place un projet régional commun avec pour mission d’appuyer les programmes nationaux des cinq pays concernés, pour développer une réponse transfrontalière au IST/VIH/sida. En effet, l’objectif principal était de freiner la propagation du VIH et réduire la mortalité et la morbidité, liées au VIH/sida au sein des populations mobiles et des populations autochtones et riveraines en interaction avec elles.

Les normes et recommandations en matière de soins apportés aux PVVIH, varient d’un pays à l’autre. Le migrant étant hors de son pays d’origine, est parfois confronté au problème d’accessibilité à l’offre de soins. Il s’agit essentiellement des difficultés liées au suivi médical et biologique, à la disponibilité des ARV, au système de recouvrement des coûts à cause de la précarité des ressources financières du patient, et aussi de l’absence de soutien psychologique et social. Ces obstacles influencent négativement l’observance au traitement. Selon une étude réalisée par Dubois et Al en 2008, une observance inférieure 95% entraîne un risque d’échappement au traitement et d’apparition de résistance virale. Il faut noter par ailleurs que la proportion de décès est plus élevée dans la tranche d’age la plus économiquement active (15 à 49 ans). Cela, pour les auteurs, représente une perte de compétence nécessaire aux pays pour leur développement économique. Greener (2004) a démontré l’impact de la pandémie du sida sur la baisse de la productivité et la croissance macroéconomique. La mise en place de stratégies afin d’assurer la continuité des soins chez les migrants vivant avec le VIH, apparaît donc plus qu’une nécessité impérieuse.


STRATÉGIE POUR GARANTIR LE CONTINUITÉ DES SOINS CHEZ LES MIGRANTS

La stratégie à mettre en œuvre pour garantir le continuum de soins des migrants vivant avec le VIH, est basée sur la mise en réseau inter pays de tous les établissements sanitaires et aussi des acteurs impliqués dans la prise en charge. Il faudra aussi créer entre les pays, un circuit de référence et de contre référence des patients. Cette interconnexion entre les centres de traitement VIH des différents pays, nécessite que ces structures soient dotées d’équipement tels que les téléphones portables, les outils informatiques et les outils de référencement. Les personnels de ces centres devraient également être formé aux modules nationaux de prise en charge VIH. Le but de cette mise en réseau, est de permettre aux populations migrantes de bénéficier des soins de qualité le long de l’axe routier, quelques soient les pays ou elles se trouvent. Les échanges d’informations entre les centres devront être effectuées en utilisant les nouvelles technologies de l’information et de communication (NTIC). Du coup, les cinq pays seront connectés à un même serveur, qui hébergera une base de données centrale. Cette base de données centrale sera capable de générer un dossier électronique du patient venu en consultation grâce à un numéro unique d’identification. La base de données sera mise à jour après chaque contact avec le patient. Les prescripteurs seront également mis en réseau via leur contact téléphonique ou leur courriel.

L’amélioration des échanges de données nécessite qu’on envisage un cadre d’interopérabilité qui devra s’appuyer sur la réglementation nationale de chacun des pays et sur les normes et standards internationaux. Ce cadre sera soutenu par une charte éthique définissant le mode de fonctionnement du réseau, le coût des actes et les informations transférables inter-pays (code du patient, profession, nationalité, traitement en cours, dernier taux de CD4 …). Cette charte sera validée par l’ensemble de tous les prescripteurs le long de l’axe routier.

Les conseillers psychosociaux seront chargés d’apporter l’appui psychosocial et nutritionnel au migrant, et de son orientation vers un site effectuant les mêmes prestations à la prochaine destination. Les conseillers psychosociaux interviendront également dans la recherche des perdus de vue.

Ce système sera animé par les ONG et associations des principaux acteurs, à savoir les transporteurs et les professionnelles de sexe. Leur rôle principal sera d’informer les populations mobiles sur l’existence des services offerts par les établissements sanitaires. Ils apporteront aussi les messages de sensibilisation sur la prévention des IST/VIH/sida.


CONCLUSION

La mise en réseau des centres de soins le long de l’axe routier de migration Abidjan – Lagos est une bonne initiative pour garantir l’accès et la continuité des soins aux populations mobiles vivant avec le VIH. La stratégie développée pourra être reproduite ailleurs pour juguler la pandémie du VIH.

réferences

samedi 13 août 2011

PLACE DES COMMUNAUTAIRES DANS LE CIRCUIT DES SOINS AUX MALADES DU SIDA : UNE DELEGATION DES TÂCHES QUI NE DIT PAS SON NOM


Le passage à échelle de la prise en charge des personnes malades du VIH/sida, a véritablement commencé en Côte d’Ivoire à la fin des années 90. L’intégration de cette prise en charge dans le paquet minimum d’activités des établissements sanitaires s’est faite, selon une approche que l’on qualifierait de vertical, avec à l’avant-garde, des institutions non étatiques. La prise en charge qui se veut globale et multidisciplinaire, a hérité d’un modèle de soins conçu pendant les projets de recherche - notamment les essais cliniques – qui ont nécessité une méthodologie rigide et contrôlée. Pour cela, il a fallu faire recours à un nouveau type de personnel, qui n’existait pas auparavant dans le circuit des soins classiques. Il s’agit des Assistants Moniteurs de Données et des Conseillers Communautaires (CC) pour lesquels, des tâches ont été bien définies. Les CC avaient pour rôles essentiels d’assurer le volet psychologique et social de la prise en charge des patients. En effet, ils devaient faire le conseil préliminaire pour faciliter l’acceptation du test de dépistage VIH par le patient et faire l’annonce de son résultat. Pour les patients déclarés séropositifs au VIH, ils devaient prodiguer des conseils pour une meilleure observance du traitement anti-rétroviral (ARV) et aussi ils devaient animer des groupes d’auto soutien constitués par les malades. Les CC sont issus pour la plupart d’organisations locales de personnes vivant avec le VIH (PVVIH). La lutte contre le sida, bénéficiant d’importantes subventions internationales dans le cadre de l’aide au développement, permet aux CC de recevoir une prime mensuelle pour l’énorme travail qu’ils abattent. Par ailleurs, pour tout ce qui concerne la prescription des traitements ARV, elle est faite selon un protocole qui ne donne « l’exclusivité » qu’au médecin et à lui tout seul. Ce postula a de tout temps été défendu par les syndicats de médecins et aussi par le programme national de prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH (PNPEC). Mais en espace de 5 années, le nombre de PVVIH bénéficiant de suivi médical, a connu une hausse spectaculaire, allant presque du simple au double. On a assisté à une augmentation de la charge de travail du personnel soignant entraînant ainsi, une baisse proportionnelle de sa performance. Dans plusieurs centres de soins, la solution a été de confier l’exécution de certains actes médicaux au personnel d’appui non médical. Par exemple, à l’hôpital général Houphouët Boigny d’Abobo (commune Nord d’Abidjan), à l’hôpital général de Duékoué et au centre hospitalier régional de Man (région Ouest) – pour ne citer que ceux là - les médecins autorisent que les CC fassent la reconduction des traitements ARV chez des patients qui ne présentent pas selon eux, de problèmes sérieux. Parfois les CC doivent mesurer les constantes anthropométriques des patients (température, poids, taille etc.) et même évaluer leur état nutritionnel. Il n’est pas rare de voir que des CC formés sur le tas, effectuent des tests de dépistage VIH des clients, et cela dit-on pour « décongestionner » le laboratoire de l’établissement. Dans certains centres comme la formation sanitaire urbaine communautaire de Port Bouet 2 et le centre de santé urbain communautaire de GESCO (communes Ouest d’Abidjan), les CC sont autorisés à dispenser les médicaments ARV. Les médecins finalement ne voient les patients que quand il s’agit de poser le diagnostic et de décider de la mise en route du traitement ARV. Il n’y a pas de doute que, nous nous dirigeons implicitement vers une délégation de tâches qui ne dit pas son nom. Ces nouvelles responsabilités confiées au personnel communautaire dans la prise en charge des PVVIH - reconnaissons le - ont permis de désengorger le goulot d’étranglement naguère constaté dans les halls d’attente des postes de consultation. Les autorités sanitaires au plus haut niveau, gagneraient à reconnaître officiellement ce type d’intervention. Elles peuvent s’inspirer par exemple des expériences du Malawi et de l’Ethiopie où le « task shifting » a été utilisé pour résoudre le problème de pénurie de personnel de santé lors du passage à échelle des soins apportés aux malades du VIH/sida. Il ne faut surtout pas perdre de vu, la nécessité de renforcer constamment la capacité technique de ce personnel communautaire, qui dans tous les cas, doit travailler sous la supervision d’un personnel médical qualifié.

dimanche 24 juillet 2011

POLITIQUE DE GRATUITE DES SOINS EN COTE D’IVOIRE: EN FIN DE COMPTE QU’EST CE QUI EST GRATUIT ?




Les ivoiriens ont connu quatre difficiles mois suite aux troubles militaro-politiques, liés à la crise post électorale. Avec l’insécurité grandissante, la fermeture des banques et des autres institutions financières, l’on a assisté à une véritable paupérisation de la population. A la fin des belligérances, les ivoiriens ont été agréablement surpris de la décision prise par le nouveau gouvernement de pratiquer une politique de gratuité des soins dans les établissements sanitaires publiques, parapubliques et à base communautaire. De l’avis de la grande majorité des gens, cette décision a été perçue comme une bouée de sauvetage en cette période de conjoncture économique. En conséquence les populations, même quand le besoin n’était pas réel, prirent d’assaut les allées des hôpitaux et autres centres de santé. Après une première phase de quarante cinq jours, allant du 16 avril au 31 mai 2011, cette politique de gratuité s’est vue prolonger pour une durée non encore déterminée. Malgré le sentiment de satisfaction constamment exprimé dans la presse par les premiers responsables du ministère en charge de la santé, la réalité sur le terrain est toute autre et des difficultés sont constatées dans la mise en œuvre de la mesure. L’augmentation fulgurante du taux de fréquentation des établissements sanitaires - parfois supérieure à 100% du taux habituel - a eu pour conséquence de perturber le système de l’offre des services.
La surcharge de travail a entraîné un « burn-out » et donc une démotivation des prestataires de soins. Cela a eu comme répercussion, une baisse relative de la qualité des prestations (réduction du temps de contact soignant – client lors des consultations < 10 minutes). Le constat général est que le paquet de services minimum sensé être gratuit - surtout dans les unités para cliniques - n’existe plus ou est insuffisamment délivré. Du fait de la sur-utilisation des services, Il y’a un épuisement rapide des stocks de médicaments essentiels, des intrants stratégiques et des consommables ; lesquels stocks qui ne sont pas immédiatement renouvelés. De nombreux laboratoires et services de radiographie ont cessé de fonctionner ces mois-ci, pour faute de disponibilité d’intrants. Les patients sont souvent obligés d’avoir recours, pour ceux qui en ont les moyens, aux établissements privés à but purement lucratif, pour effectuer des examens d’explorations para-cliniques. Ainsi, les sacro-saints principes de globalité et de continuité qui sous-tendent la délivrance des soins, ont du coup été foulés aux pieds.
Par ailleurs, il faut noter que le retard à l’arrivée des subventions promises et même débloquées par l’état comme mesure compensatoire, rend difficile la tache des gestionnaires des établissements sanitaires à assurer, ne serait-ce que l’entretien des locaux. Face à tout cela, on est en droit de se poser la question de savoir ; « en fin de compte qu’est ce qui est gratuit dans cette politique de gratuité de soins ? ».
Les solutions que nous proposons sont :

1- Si cette mesure de gratuité est le début de l’instauration de la Couverture Maladie Universelle (CMU) tant promise lors de la campagne électorale de l’actuel président ; que les ressources soient effectivement mobilisées pour en assurer la mise en œuvre. Un accent particulier doit être mis sur la mise en place de mesures d’accompagnement véritablement pérennes.
2- Dans le cas contraire, que l’on revienne au système de payement direct qui était en vigueur auparavant.
3- Ou que la politique de gratuité soit strictement « catégorielle » comme proposé dans le rapport du The Global Campaign for the Health Millennium Development Goals – 2009. C'est-à-dire que la mesure soit valable seulement pour les couches sociales les plus vulnérables, à savoir les femmes enceintes et les enfants de moins de cinq ans. Elle pourrait être élargie aux personnes de troisième âge.

lundi 4 juillet 2011

A PROPOS DE L'ORGANISATION DE L'OFFRE DE SOINS A ABOBO PENDANT LA GUERRE


Pendant les troubles qui ont précédés le deuxième tour des élections présidentielles en Côte d’Ivoire, nombreux sont les établissements sanitaires qui ont vus leur fonctionnement perturbé. La presque totalité (98%) des hôpitaux et autres centres de santé de la commune d’Abobo (un faubourg au nord d’Abidjan) ont été fermé, du fait de l’absence du personnel soignant. Ceux-ci ont dit craindre pour leur vie car il n’y avait plus de sécurité, ce qui est fort légitime. L’ONG internationale « Médecin Sans Frontière», pour répondre aux besoins criards de soins de santé, s’est installée à l’hôpital général d’Abobo Sud. Comme à son habitude en situation de crise, MSF n’offre que des services d’urgences médicochirurgicales. MSF a mis en place une organisation temporaire qui garantie la disponibilité des médicaments de première nécessité, l’accessibilité aux examens biologiques standard et le renforcement du plateau technique. Il a également renforcé son staff technique en recrutant du personnel sur place, au travers de contrat de courte durée. Par ce contrat, le personnel s’engage à assurer un paquet d’activités de soins médicaux, chirurgicaux et obstétricaux d’urgence moyennant une prime mensuelle plus ou moins consistante, qui lui est versée par MSF. Cela est de bonne guerre et cadre avec le contexte, mais ce même personnel a déserté son poste sous le prétexte « légitime » que sa sécurité n’était point assurée. J’en veux pour preuve qu’un chirurgien d’un autre hôpital de la même commune (HG Abobo Nord), absent de son poste tout le mois de mai, était présent à l’hôpital général d’Abobo Sud au côté de MSF. Le constat général a été que, le personnel qui, en temps normal n’était pas toujours disponible, a fait montre d'une ponctualité et d'une assuidité exceptionnelle à son « poste MSF ». Certains ont même élu domicile dans l’enceinte de l’établissement, dormant parfois dans leur bureau, juste pour ne pas manqué à l’appel. ils furent certainement guidé par la « conscience professionnelle ».
En tenant compte de ce qui précède, on est amené à faire les recommandations suivantes :
1) - Que l’état, par l’intermédiaire du ministère en charge de la santé, adopte la même attitude que les ONG et institutions internationales comme MSF, CICR, ACF, SAVE THE CHILDREN et autres Médecin Du Monde. C'est-à-dire que l’état, avec le soutien renforcé des organes du Système de Nations Unis, et conformément aux conventions de Genève (1949) et ses protocoles additionnels, garantisse la protection des blessés et malades ainsi que des personnels de santé en période de guerre.
2) – Que l’état prévoit aussi le versement des primes exceptionnelles, dites « primes de crise » aux personnels qui acceptent de consentir le sacrifice afin d’assurer le maintien d’un service minimum dans les établissements de santé en période de trouble majeur.